L’essence du Gamaku
On peut transmettre que le Gamaku désigne l’art du centre : le contrôle du bassin, des hanches et du bas-ventre (hara) dans chaque geste. Gamaku ne se limite pas à la rotation des hanches ; c’est la “ceinture de vie”, la source de stabilité, de puissance et de santé. Si tchinkutchi donne la connexion, gamaku donne la direction, l’équilibre, la fluidité.
Qu’est-ce que le Gamaku ?
- Définition : Le mot « gamaku » en dialecte d’Okinawa désigne la région autour du bassin, mais surtout l’aptitude à mobiliser les hanches et la taille pour amplifier, guider et stabiliser chaque technique. Le gamaku, c’est la “clef de voûte” du corps martial : c’est lui qui relie le bas au haut, qui donne le tranchant au poing, l'explosivité à la frappe, l'ancrage à la position.
- Physiologie et énergie : L’activation consciente du gamaku lie la puissance des jambes au torse, oriente la force du hara, permet la rotation souple et le transfert du poids. Son action active la zone du “tan den” (hara), carrefour énergétique et moteur de tout mouvement vital.
Le rôle du gamaku dans le Goju-Ryu
- Pivot central : Sans gamaku, les gestes sont flottants, inefficaces. Avec lui, chaque technique part du centre, rayonne par la taille, et se propage dans les extrémités.
- Stabilité et mobilité : Gamaku permet, dans chaque posture (sanchin-dachi, shiko-dachi…), d’ancrer le corps sans se figer. Il stabilise le tronc, autorise un enracinement fort, mais libère aussi la mobilité pour tourner, pivoter, esquiver, riposter : c’est ne des sources du “dur et souple”.
- Transmission/rotation : Toute frappe (tsuki, geri), tout blocage (uke waza), tout déplacement, tout changement brutal de direction (tai sabaki) sont efficaces si la taille participe. Le “kaiten” du bassin multiplie l’énergie sans besoin d’effort musculaire disproportionné.
Gamaku dans la pédagogie Shorei-Kan
- Dès le Junbi Undo : Les exercices préparatoires insistent sur la mobilisation des hanches : rotations, assouplissements, ancrages. On y apprend l’art de sentir (“kan”) et d’utiliser (“shi”) le centre dans l’immobilité comme dans le mouvement.
- Dans les kihon et kata : À chaque technique, on rappelle : “le moteur dans les hanches”. Un bon gamaku, c’est une frappe vivante ; l’absence de gamaku donne un geste vide ou forcé.
- Dans le Sanchin Kata : Le contrôle isométrique du bassin — ni “cambré”, ni “cassé” — est la marque du sanchin correct. Sentir le gamaku dans la tension et le relâchement, c’est s’approcher de l’énergie profonde du style.
- Kiso Kumite/Kumite réel : La force du bas ventre guide esquive, absorption, projection et frappe, le tout “dans le souffle”, sans tension excessive.
Applications concrètes et symboliques
- Alignement : Un bon gamaku aligne la colonne, protège le dos, optimise l’arrivée de force lors de l’impact.
- Puissance cachée : Un petit mouvement discret de la taille suffit à amplifier la vitesse ou la puissance d’un tsuki, à déséquilibrer un adversaire, à restituer l’énergie reçue dans un bunkai.
- Économie et protection : Celui qui sait mobiliser gamaku fatigue moins, se blesse moins, progresse davantage, peu importe l’âge ou la condition.
Préceptes d'enseignements
- Écoute ton centre ! : Ne laisse jamais le haut du corps dicter le mouvement. Le bassin commande, les bras et les jambes suivent.
- Travaille la fluidité, jamais la force brute : Le gamaku relie et fait circuler, il ne bloque jamais. La taille doit être souple, consciente, prête à pivoter sans effort.
- Sens de la respiration “dans le bassin” : À chaque souffle, sentir le centre s’ouvrir, se refermer. Inspire, anime le ventre, expire, guide les hanches.
- Cherche le gamaku dans chaque kata : Clef de Sanchin ou de Seisan, c’est aussi un fondement de toutes pratiques, visible ou caché dans chaque étape de la voie.
- Entraîne gamaku dans les transitions : Ne néglige pas les passages d’une position à l’autre. La puissance vient souvent de là où l’on ne regarde pas.
Dans le Goju-Ryu authentique, le gamaku, est un des axes de la vie martiale : il relie, anime, protège et décuple, il est l’invisible qui porte le visible. Celui qui conquiert son centre, conquiert la force, la mobilité et la sérénité. On invite à le cultiver inlassablement, dès maintenant et jusqu’au dernier souffle du pratiquant éclairé.
